Alors que le second confinement était levé, nous reprenions la route à la rencontre des commerçants plus que jamais volontaires pour rattraper les derniers mois sclérosés. Derrière les vitrines réagencées avec attention pour l’occasion, chacun s’attelait au travail pour réunir les conditions sanitaires demandées. Gels hydroalcooliques, masques, et marquage au sol ainsi installés, il ne manquait plus que les clients pour faire revivre l’activité commerçante. Et, la réalité a dépassé les attentes ; une forme d’effervescence a entouré les boutiques ; pas seulement parce que les clients y venaient nombreux pour consommer mais également parce qu’ils montraient un véritable intérêt pour le sort de leurs commerces de proximité. Une attention nouvelle a été prêtée aux boutiques comme si la dénomination de non essentiels avait suffit à impulser une prise de conscience générale sur la nécessité des magasins de jouets, de décoration, des fleuristes, des librairies, des chausseurs etc… En somme, après un an d’une pandémie qui nous a éloignés et isolés ; une forme d’urgence est apparue : celle de de réaffirmer les commerces comme lieux de sociabilité et de partage. Cependant, les retrouvailles avec ce monde d’avant où l’on pouvait flâner de boutiques en boutiques dans les centres villes étaient marquées par les stigmates de la crise ; ceux de la distanciation sociale, de l’évitement physique, et dans lequel les lieux culturels et les restaurants restaient fermés. C’est le principe même de la convivialité des bourgs qui est alors mis à l’épreuve et face auxquels les commerces ont dû redoubler d’inventivité pour retrouver une expérience client des plus normale.
Au fur et à mesure de nos tournées, de nos rencontres nous avons été marqués par cette force d’adaptation et de proposition dont chacun à son échelle a fait preuve. C’est pourquoi aujourd’hui notre société voulait les mettre en avant avec ce blog.
Le regain d’intérêt pour les bourgs et les centres villes
Une certaine tendance s’est imposée depuis le premier confinement celle de consommer local ; tendance qui profite indiscutablement aux commerces indépendants. Les causes sont probablement multiples et celles que nous nous proposons d’aborder ne sont pas exhaustives.
- La première tiendrait du caractère rassurant des commerces de proximité : les mesures sanitaires y étant plus facilement appliquées que dans les grandes surfaces et leur affluence foisonnante.
- En ces temps d’incertitudes, aller faire ses courses ou ses emplettes dans les commerces près de chez nous, procurait un sentiment de familiarité, d’intimité inspirant ainsi notre confiance.
- Ce regain d’intérêt pour les centres villes témoigne dès lors d’une transformation de nos valeurs collectives sur le plan à la fois écologique et sociale. Ecologique parce que le parti pris du local révèle une envie grandissante de consommer durable et responsable ; peut-être par peur que nos modes de consommations nous amènent sur le long terme à connaître de nouvelles pandémies.
Evolution des valeurs sociales également, car la pandémie nous a fait revaloriser le vivre ensemble que favorise les réseaux de commerces : se croiser, renouer contact au détour de rues passantes, échanger entre deux rayons etc. Cette recrudescence des valeurs de sociabilité pourrait expliquer l’intérêt porté aux commerçants et les encouragements qu’ils ont pu recevoir : parce que leur fermeture ne symbolisait plus seulement l’arrêt d’une partie de l’économie mais aussi le retour à une forme d’autarcie individuelle. - Par ailleurs, avec la fermeture des boutiques, nos achats devenaient exclusivement digital. Si ce mode d’achat s’est révélé pratique pour assurer la distanciation sociale son usage intensif en a aussi révéler ses limites :
- Un certain manque s’est fait ressentir, celui d’un contact direct avec les produits, leurs matières, leurs textures, leurs couleurs, leurs volumes.
- Ce qui manquait également avec les achats en ligne était l’expertise, le conseil client. En effet, le confinement a été l’occasion de se découvrir de nouveaux passe-temps, de nouvelles passions qui mettaient à l’honneur le fait main, le fait maison. Que ce soit le bricolage, la cuisine ou encore le jardinage, toutes ces nouvelles activités nécessitent un certain savoir-faire. Et qui de mieux que nos artisans et commerçants pour en détenir les secrets ? Ainsi, nous nous sommes tournés dès que cela était possible vers ces derniers pour leur demander conseils sur les techniques, les matériaux et les outils indispensables.
- La personnalisation du service était ainsi retrouvée car le conseil client révèle une disponibilité, une adaptabilité aux envies des acheteurs. Là est tout la dimension de sociabilité du commerce, sans compter que les conseils peuvent se partager, se discuter entre les différents clients présents dans la boutique, chacun apportant son avis et sa contribution. Les commerces de proximité n’ont jamais aussi bien portés leur noms et ont réinstauré la convivialité qui fait toute leur attractivité.
La résilience plutôt que la résignation :
La résilience se définit par la capacité d’un système, d’une société ou d’un groupe d’individu à s’adapter, à corriger des risques et des dangers notamment en préservant ses fonctions essentielles. La résilience contrairement à la résistance – qui tente d’éliminer l’aléa – vise à en réduire au maximum les effets néfastes.
Cette définition résonne particulièrement avec les actions des commerces lors de la crise sanitaire. Sachant qu’il fallait participer à l’effort collectif pour ralentir la pandémie, les commerçants n’ont pas essayé d’entrer en résistance face aux mesures imposées qu’ils leur étaient parfois défavorables. Pour autant, cette acceptation n’a pas été de la résignation, en ce sens que chacun avec ses outils et ses capacités a tenté de rester actif. Ils s’agissait alors d’innover à partir des restrictions imposées pour réduire l’impact négatif que ces dernières pouvaient avoir sur leurs affaires.
Les commerces ont réussi à offrir de nouveaux services ;
- click and collect
- livraison à domicile
- présentation des nouvelles collections sur leurs réseaux sociaux
Tout était mis en place pour ne pas se faire oublier des consommateurs. Les commerçants ont relevé des défis logistiques et ont ainsi prouvé qu’ils étaient capables de s’adapter effectivement et rapidement aux changements des habitudes de consommation impliqués par les confinements. Il ne restait plus qu’aux clients de choisir le canal qui leur convenait pour commander leurs produits préférés. D’une certaine manière la personnalisation du service client a été maintenue malgré la fermeture des boutiques. Et quand il a fallu réouvrir avec des mesures sanitaires strictes, les commerces ont une fois de plus affirmé leur tolérance et leur patience. Pour limiter les regroupements de trop nombreuses personnes au sein de leurs établissements et compenser les heures perdues avec les couvre-feux, certains ont choisi d’accueillir leurs clients sur rendez-vous entre midi et quatorze heures ; d’autres n’ont même pas attendu les soldes d’hiver pour organiser des déstockages pour limiter les pertes au cas où un troisième confinement était annoncé. D’une certaine manière les boutiques ont elles aussi appliqué le principe du quoi qu’il en coûte : rester ouverts, continuer de travailler même si cela impliquait de sacrifier leurs temps de travail ou bien leurs marges.
Les commerces ont fait preuve de persévérance et d’inventivité pour maintenir leurs établissements ouverts tout en faisant preuve de bonne volonté vis-à-vis des mesures sanitaires, bonne volonté que la plus grande partie de leur clientèle leur a bien rendu. Leur investissement total a prouvé que leur activité n’était pas qu’une profession mais un mode de vie, qu’ils partagent avec leurs clients. Ainsi, ils réintroduisent confiance, entraide, solidarité voire convivialité dans une période qui nous avait pourtant isolés. Et quand on sait que l’utilité ne se définit pas seulement par ce qui est vital ou efficace mais également par ce qui est signifiant, c’est-à-dire qui donne du sens à l’existence, alors nous comprenons pourquoi les commerces nous semblent aujourd’hui particulièrement essentiels.